Journée d’étude internationale | Appel à communications
Développement économique et transformations environnementales dans les périphéries extractives en Europe (XVIe–XXIe siècles)
EHESS – École des Hautes Études en Sciences Sociales (Paris, France) – 21 Novembre 2018
Date limite pour l’envoi des résumés : 30 Mai 2018.
L’extraction de ressources est à la base de l’économie. Elle concerne toute activité tirant de la nature des matières premières qui sont directement utilisées ou transformées en vue d’un ajout de valeur. D’échelles variables, allant des usages traditionnels des sociétés prémodernes aux formes modernes d’exploitation mettant en jeu de larges infrastructures et des technologies complexes, les activités extractives relèvent du secteur primaire. Des exemples d’extraction sont la chasse, la pêche, l’agriculture, la sylviculture, l’exploitation minière, le forage de pétrole et de gaz. Partant du constat que la géographie des ressources a joué un rôle central dans le développement économique de l’Europe, la journée d’étude vise à analyser le rôle de l’extraction en se concentrant plus particulièrement sur les territoires impliqués dans de telles activités au sein du continent lui-même.
En dépit de l’expansion européenne outre-mer, les zones essentiellement dédiées à l’extraction de ressources ne disparurent jamais du continent. Entre les XVIe et XXIe siècles, de nombreux territoires européens connurent à un moment de leur histoire une spécialisation dans l’extraction de ressources. Toutes les parties du continent furent concernées, que ce soit au niveau national, régional ou local. On peut citer quelques exemples parmi bien d’autres : les plaines de Pologne, principal fournisseur européen de céréales aux XVIe et XVIIe siècles ; la forêt du Morvan, spécialisée dans la récolte de bois pour le marché parisien ; les bassins houillers du Yorkshire et du Lancashire, au centre du décollage britannique au XVIIIe siècle ; le Norrland, qui a alimenté l’économie suédoise en produits forestiers et en divers minéraux durant l’industrialisation du pays ; la mer du Nord, qui reste encore aujourd’hui un fournisseur majeur de pétrole et de gaz, etc.
Considérant les économies extractives dans une perspective de long terme, les historiens ont abordé la question du développement inégal, s’interrogeant sur les raisons faisant que certains pays ou régions se développent plus rapidement et intensément que d’autres. Il apparaît que, dans certains cas, l’extraction de ressources peut apporter d’importants revenus supplémentaires à l’économie d’une région, encourageant le bien-être de la population si une partie des revenus sont investis dans le développement humain, l’éducation par exemple. Si ce n’est pas le cas, une spécialisation dans l’extraction de ressources peut causer des problèmes comme la dépendance, l’extraversion et la désarticulation de l’économie locale. Les territoires extractifs deviennent alors des périphéries dominées technologiquement, économiquement et politiquement par les régions qui importent et transforment leurs matières premières. Ces relations déséquilibrées sont intimement liées aux problèmes environnementaux. Récemment, des études ont mis l’accent sur la tendance que les pays et régions centrales ont à déplacer les fardeaux environnementaux dans les périphéries de l’économie mondiale, ce qui contribue à ralentir ou à entraver leur développement économique[1]. Les travaux consacrés aux flux inégaux de matière et d’énergie entre les pays riches et pauvres affirment que la détérioration des termes de l’échange et la persistance d’un échange inégal rendent les périphéries extractives non seulement sous-développées, mais aussi écologiquement appauvries. L’extraction inconsidérée peut affecter l’écosystème de plusieurs façons. Cela peut entraîner la dégradation de l’environnement par l’épuisement des ressources et/ou la pollution de l’air, de l’eau et du sol, ainsi que par la destruction de l’habitat, de la flore et de la faune.
Puisque l’environnement et l’économie sont de plus en plus étudiés ensemble, nous encourageons les auteurs à soumettre des articles explorant l’histoire du développement dans les périphéries extractives européennes en lien avec les changements ayant affecté leur environnement. Les communications peuvent porter sur n’importe quelle partie de l’Europe entre les XVIe et XXIe siècles, que cela soit dans une perspective de long terme ou en se concentrant sur une période spécifique. Les questions suivantes illustrent certains aspects pouvant être abordés :
■ Où sont apparus des périphéries extractives en Europe et quelles étaient leurs caractéristiques environnementales ? Comment sont-elles passées sous la domination des centres ?
■ Sous l’influence de quels acteurs ces territoires sont-ils devenus des pourvoyeurs de ressources naturelles aux niveaux local, régional, national et européen?
■ Quels ont été les modes d’extraction utilisés dans ces périphéries et comment ces derniers ont-ils façonné l’évolution des environnements locaux et des modes de développement à court, moyen et long terme?
■ Quels étaient les savoirs sur l’extraction de ressources dans les périphéries d’une part, et dans les centres, de l’autre? À partir de quand ont émergé des préoccupations concernant l’environnement ?
■ De quelle manière et à quel rythme les transformations de l’environnement ont-elles influencé l’évolution des activités extractives dans les périphéries?
■ Quelle a été la contribution des périphéries extractives au développement de l’Europe, des pays européens et des villes européennes, et à quels coûts environnementaux?
■ Quels changements ont permis aux périphéries extractives de diversifier leurs activités et de sortir de la domination des centres?
Informations complémentaires :
Les langues utilisées durant la journée d’étude seront l’anglais et le français.
Si vous souhaitez participer, envoyez votre candidature à jawad.daheur@ehess.fr en copie à nadja.vuckovic@ehess.fr avant le 30 mai 2018. Les propositions doivent inclure dans un même fichier votre adresse e-mail, un court CV, un titre et un résumé (500 mots maximum). La réponse des organisateurs est prévue pour le 30 juin 2018. Les versions écrites des présentations sont attendues pour le 15 octobre 2018, afin de les faire circuler entre participants.
L’un des objectifs de l’atelier est de consolider le groupe de chercheurs travaillant sur les ressources naturelles au sein du réseau Tensions of Europe[2]. Le lendemain de la journée d’étude, une session spéciale, pour les participants potentiellement intéressés, sera consacrée à la discussion sur de possibles projets collaboratifs et à la recherche de sources de financement. Un autre débouché possible de la journée pourrait être une publication dans une revue à comité de lecture.
Les organisateurs et partenaires du projet finalisent actuellement le financement de l’atelier et devraient être en mesure d’assurer l’hébergement pour la majorité des participants, en particulier ceux qui ne disposent pas de financement propre. Les frais de déplacement pourront être pris en charge pour certains étudiants et chercheurs en début de carrière. Merci de nous indiquer si vous avez besoin d’une aide financière pour vous loger et/ou vous rendre à Paris.
Organisateur :
Jawad Daheur, postdoctorant au CERCEC/CRH, EHESS (Paris, France).
Comité scientifique :
Marc Elie, CNRS-CERCEC (Paris, France)
Laurent Herment, CNRS-CRH (Paris, France)
Matthias Heymann, Université d’Aarhus (Danemark)
Thomas Le Roux, CNRS-CRH (Paris, France)
Raphaël Morera, CNRS-CRH (Paris, France)
Partenaires du projet :
– Tensions of Europe. Technology and the Making of Europe
– Le RUCHE, branche française de l’ESEH
– École des hautes études en sciences sociales (EHESS)
– Centre d’études sur la Russie, le Caucase et l’Europe centrale (CERCEC, EHESS)
– Centre d’études historiques (CRH, EHESS)
– Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)
– GDRI AAA Agriculture, Approvisionnement, Alimentation CNRS
[1] Voir par exemple : Alf Hornborg, « Towards an Ecological Theory of Unequal Exchange Articulating World System Theory and Ecological Economics », Ecological Economics, vol. 25, n°1, 1998, p. 127-136 ; Juan Martinez-Alier et Maite Cabeza-Gutes, « L’échange écologiquement inégal », in Michel Damian et Jean-Christophe Graz (ed.), Commerce international et développement soutenable, Paris, Economica, 2001, p. 175 ; James Rice, « Ecological unequal exchange: international trade and uneven utilization of environmental space in the world system », Social Forces, vol. 85, n°3, 2007, p. 1369-1392 ; Cyria Emelianoff, « La problématique des inégalités écologiques, un nouveau paysage conceptuel », Écologie & politique, vol. 35, n°1, 2008, p. 19-31 ; Alf HORNBORG, « Zero-Sum World: Challenges in Conceptualizing Environmental Load Displacement and Ecologically Unequal Exchange in the World-System », International Journal of Comparative Sociology, vol. 50, n°3/4, 2009, p. 237-261.
[2] Pour plus d’informations sur ce groupe, voir http: //toe2.du -de.nl/technology-environment-and-resources/ ou contacter les coordinateurs : Elena Kochetkova len.kochetkova@gmail.com / Matthias Heymann matthias.heymann@css.au.dk
International workshop | Call for papers
Economic development and environmental transformations in Europe’s extractive peripheries (16th – 21st centuries)
EHESS – School for Advanced Studies in Social Sciences (Paris, France) – 21 November 2018
Deadline for abstract submission: 30 May 2018.
Resource extraction is fundamental to the structure of the economy. It involves any activity that extracts raw materials from nature, which are then directly used or processed to add value. Ranging in scale from the traditional use of pre-industrial societies to modern resource exploitation involving large infrastructures and complex technologies, extractive activities are the basis of the primary sector of the economy. Examples of extraction are hunting, fisheries, farming, forestry, mining, oil and gas drilling. Starting from the observation that the geography of resources has always played a crucial role in shaping the conditions of European economic development, the workshop aims at exploring the role of extraction by focusing on territories involved in such activities within the continent itself.
Despite European expansion overseas, areas primarily devoted to resource extraction never disappeared in Europe. Between the 16th and the 21th century, many European territories have experienced a specialisation in resource extraction at some point. All parts of the continent have been involved, either at a national, regional or local level. Examples of such territories are, among others: the Polish plains, main grain supplier in Europe during the 16th and 17th centuries; the Morvan forest, specialising in timber harvesting for the Parisian market; the coalfields of Yorkshire and Lancashire, central to the British take-off in the 18th century; the Norrland, which fuelled the Swedish economy in forest products and various minerals during and after the industrial revolution; the North Sea, which today remains a major supplier of oil and gas, etc.
Looking at extractive economies in a long-term perspective, historians have addressed the intriguing question of comparative development, asking why some countries or regions developed much faster and further than others. In some cases, natural resource extraction can add substantial amounts to a region’s wealth and finally encourage welfare if some of the increase in income gets spent on human development such as education. If not, specialisation in resource extraction can cause problems such as dependence, extroversion and disarticulation of the local economy. In this case, extractive territories become peripheries being technologically, economically and politically dominated by areas importing and transforming their raw materials. This unbalanced relationship is intimately intertwined with environmental issues. Recently, scholars have emphasised the tendency of core countries and regions to displace environmental burdens into the peripheries of the world economy, slowing down or hindering their economic development[1]. According to studies devoted to the uneven flows of matter and energy between rich and poor countries, declining terms of trade and persistent unequal exchange render extractive peripheries not only underdeveloped, but also ecologically impoverished. Indiscriminate extraction can affect the ecosystem in many ways. It may lead to the deterioration of the environment through depletion of resources and/or the pollution of air, water and soil, the destruction of habitat and wildlife.
Since environment and economy are increasingly being studied together, we encourage authors to submit papers exploring the history of development in Europe’s extractive peripheries in connection with the changes that affected their environment. Papers may deal with any parts of Europe between the 16th and 21th centuries, whether in a long-term perspective or focusing on a specific period. The following questions illustrate some issues that could be addressed:
■ What were the geographical locations and the environmental conditions of extractive peripheries in Europe? How did they pass under the domination of centres?
■ Under the influences of which actors did these territories become providers of natural resources at local, regional, national and European levels?
■ Which were the modes of extraction used in these territories and how did they shape the evolution of local environments and patterns of development in short, middle and long term?
■ What kind of knowledge was available about resource extraction in the peripheries on the one hand, and in the centers, on the other? When did environmental concerns start to emerge?
■ In which ways and at what pace did the transformations of the environment influence the evolution of extractive activities in the peripheries?
■ How did European extractive peripheries contribute to the development of Europe, European countries and European cities, and at which environmental costs?
■ What were the changes that enabled extractive peripheries to diversify their activities and to get out of the domination of the centres?
Further information:
The languages of the workshop will be English and French.
If you are interested in applying, please, send your application to jawad.daheur@ehess.fr with a copy to nadja.vuckovic@ehess.fr by 30 May 2018. All the proposals need to include your e-mail address, a short CV, a title and an abstract (max. 500 words) in a unique file. You will receive a reply from the organisers by 30 June 2018. Draft papers have to be submitted by 15 October 2018.
One specific goal of the workshop is to continue and consolidate a research network on natural resources within the Research Group on Technology, Environment and Resources of the Tensions of Europe Network[2]. The next day, on 22 November, interested participants are invited to a discussion session about further ways of collaboration and options for funding. Another possible outcome of the workshop could be a publication in a peer-reviewed journal.
The organisers and project partners are currently finalising the workshop’s funding and hope to provide hotel accommodation for most of participants, especially those without their own funding. A limited number of travel grants also may be available for students and early career researchers. Please tell us if you need support with accommodation and/or travelling to Paris.
Organizer:
Jawad Daheur, Postdoctoral Researcher at CERCEC/CRH, EHESS (Paris, France).
Scientific committee:
Marc Elie, CNRS-CERCEC (Paris, France)
Laurent Herment, CNRS-CRH (Paris, France)
Matthias Heymann, Aarhus University (Denmark)
Thomas Le Roux, CNRS-CRH (Paris, France)
Raphaël Morera, CNRS-CRH (Paris, France)
Project’s partners:
– Tensions of Europe. Technology and the Making of Europe
– The RUCHE, French branch of the ESEH, European Society for Environmental History
– School for Advanced Studies in the Social Sciences (EHESS)
– Center for Russian, Caucasian and Central European Studies (CERCEC, EHESS)
– Center for Historical Studies (CRH, EHESS)
– French National Center for Scientific Research (CNRS)
– GDRI AAA Agriculture, Approvisionnement, Alimentation CNRS
[1] See for instance: Alf Hornborg, « Towards an Ecological Theory of Unequal Exchange Articulating World System Theory and Ecological Economics », Ecological Economics, vol. 25, n°1, 1998, p. 127-136 ; Juan Martinez-Alier et Maite Cabeza-Gutes, « L’échange écologiquement inégal », in Michel Damian et Jean-Christophe Graz (ed.), Commerce international et développement soutenable, Paris, Economica, 2001, p. 175 ; James Rice, « Ecological unequal exchange: international trade and uneven utilization of environmental space in the world system », Social Forces, vol. 85, n°3, 2007, p. 1369-1392 ; Cyria Emelianoff, « La problématique des inégalités écologiques, un nouveau paysage conceptuel », Écologie & politique, vol. 35, n°1, 2008, p. 19-31 ; Alf HORNBORG, « Zero-Sum World: Challenges in Conceptualizing Environmental Load Displacement and Ecologically Unequal Exchange in the World-System », International Journal of Comparative Sociology, vol. 50, n°3/4, 2009, p. 237-261.
[2] For further informations about this group, please see http://toe2.du-de.nl/technology-environment-and-resources/ or contact the coordinators : Elena Kochetkova len.kochetkova@gmail.com / Matthias Heymann matthias.heymann@css.au.dk